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martes, 13 de enero de 2015

Le terreau du radicalisme politique est au bout de la ligne du métro parisien, pas à Raqqa, «capitale» autoproclamée de l'Etat islamique.


Nous faisons la guerre, 
mais nous ne l'assumons pas

par Jean-Dominique Merchet

Les terroristes sont nos enfants : le livreur de pizza devient l'ennemi intérieur


Nous sommes en guerre, mais nous ne l'assumons pas. En guerre contre qui ? «Le terrorisme et le fondamentalisme» a répondu, dès mercredi, le président de la République dans son allocution à la suite de l'attentat contre Charlie Hebdo. Mais le terrorisme et le fondamentalisme sont des des notions bien abstraites : le premier désigne un moyen d'action, le second l'attachement excessif à des principes. Pour tuer, ces idées doivent s'incarner dans des êtres de chair bien réels, en l'occurrence tueurs qui ont mené l'attaque de mercredi à Paris. 

Alors que François Hollande évitait soigneusement de prononcer des mots comme islam, djihad ou musulman, les deux suspects, les frères Chérif et Saïd Kouachi, plaçaient explicitement leur attaque sous une bannière religieuse, en criant comme ils l'ont fait «Allahou Akbar» et «Nous avons vengé le Prophète». 

C'est un fait, dérangeant pour les innombrables Français attachés au «vivre-ensemble» et sans doute pour les musulmans pieux au premier chef, qui voient dans ces actes un «dévoiement absolu» de leur religion. Cette gêne, palpable dans les prudences des commentaires et des réactions, ne doit pourtant pas empêcher de comprendre ce qu'il arrive à notre pays. Pourquoi Chérif et Saïd Kouachi ont-ils fait cela ? Pourquoi, après Mohammed Merah à Toulouse et Mehdi Nemmouche à Bruxelles, sont-ils devenus cela ? Expliquer n'est pas excuser.

Dans la réalité des faits, la France est en guerre contre les terroristes. Mais, d'habitude, les Français ne s'en rendent pas compte car tout se passe loin de nos frontières. 

Depuis deux ans, l'armée française combat des «groupes armés terroristes» au Mali puis dans tout le Sahel. Un second front a été ouvert cet été, avec l'engagement de l'aviation française contre Daesh (l’Etat islamique) en Irak. Ces engagements militaires font l'objet d'un quasi-consensus des forces politiques. A la mi-décembre, le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian se réjouissait du bilan de l'opération Barkhane : «Depuis le 1er août, nous avons pu neutraliser une soixantaine de djihadistes, essentiellement dans le nord du Niger et du Mali. Près de 200 ont été neutralisés en un an et parmi eux, des chefs importants.» «Neutraliser», en langage militaire, signifie tuer. 

En Irak, les Rafale et les Mirage français frappent régulièrement d'autres djihadistes. Un communiqué laconique du ministère de la Défense annonce généralement qu'au cours d'un raid, nos avions ont «neutralisé plusieurs membres de Daesh». Mercredi prochain, François Hollande se rendra à bord du porte-avions Charles-de-Gaulle qui appareillera pour le Golfe, afin de renforcer le dispositif français. Et ce jeudi, le Pentagone annonçait de son côté que la coalition avait tiré près de 5000 bombes contre les groupes djihadistes en Irak et en Syrie, depuis le mois d'août. Ces bombes tuent, elles aussi.

On prête cette phrase au général De Gaulle : «La guerre, c'est comme la chasse, sauf qu'à la guerre les lapins tirent». Vivant en paix depuis 70 ans, nous avons fini par oublier cette évidence que les lapins tirent... 

Peu importe, au fond, de savoir qui a commencé la guerre, et même qui mène le juste combat, mais il faut se souvenir que l'ennemi frappe lui aussi. Avec ses propres moyens et sur les objectifs qui lui importent le plus. Nous l'avons vu mercredi dans les locaux de Charlie Hebdo : une frappe de précision contre une cible soigneusement choisie pour son islamophobie supposée. Effet politique colossal ; mission accomplie.

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