UTOPISTE QUI VEUT FAIRE MON BONHEUR, T’ES-TU REGARDÉ DANS UN MIROIR ?
par Aimé MICHEL
En 1981, le marxisme est ce que les marxistes eux-mêmes appellent un « amalgame ». Il y a le marxisme philosophique (enseigné comme le dernier mot de la réflexion philosophique dans la plupart de nos lycées) ; il y a le marxisme de Brejnev (qui n’est que l’art de consolider et accroître les privilèges d’une mince classe politique) ; il y a le marxisme de M. Marchais (qui n’a sûrement jamais lu de Marx que quelques morceaux choisis, utiles pour amener à point les bonnes citations) ; il y a le marxisme de la base, aussi hétéroclite que n’importe quelle doctrine politique en France ; et que sais-je encore ?
Une autre cochonnerie de même tonneau
Face à un phénomène si complexe intarissablement commenté depuis plus d’un siècle par tant d’abstracteurs de quintessence, il est prudent de juger l’arbre à ses fruits. Pour M. Marchais, le bilan est « globalement positif » [1]. Mais le bilan de quoi ? À part quelques malheureux pays du Tiers-Monde, le « bilan » universel, rapporté à Octobre 1917, est partout « globalement positif », au moins sur le plan matériel. La seule comparaison scientifique valable aurait été celle de l’Union Soviétique actuelle avec une Russie ayant évolué depuis Octobre 1917 comme n’importe quel autre pays « capitaliste ». A priori, on ne voit pas pourquoi cette Russie qui n’a pas été n’aurait pas été maintenant aussi prospère que le reste de l’Occident. Eh, oui, pourquoi pas ? ou même plus prospère, compte tenu de ses énormes ressources naturelles, de son peuple innombrable et fécond, de sa profondeur spirituelle ? Rêve incroyable ! Nous serions peut-être tous russifiés, et heureux de l’être ! Alexandre Zinoviev, puissant génie pessimiste, n’en croit rien, à moins qu’il ne feigne, pour tromper son désespoir, de n’en rien croire. « Si le marxisme n’avait pas existé, dit l’un de ses ivrognes philosophes, nous aurions inventé une autre cochonnerie de même tonneau, et croyez-moi, mes chers amis, nous serions dans cette même merde » (a).
L’arbre à ses fruits : eh bien, ils sont amers. À peu près partout dans le monde où deux pays communistes ont une frontière commune, ou bien ils sont en état de guerre, ou bien le plus fort domine l’autre par la violence. Regardez la mappemonde !
Ceci pour les relations extérieures. À l’intérieur, tout est dit, je crois : pagaïe planifiée, pénurie, gâchis des hommes et des choses, démoralisation, arbitraire, goulag[Cette brève description des dernières années du communisme soviétique s’accorde parfaitement avec celle d’Alain Besançon, membre de l’Institut, qui fut professeur à l’Ecole des hautes études en sciences sociales, dans un livre court, clair et profond surLe malheur du siècle. Communisme, nazisme, Shoah (coll. Tempus, Perrin, 2005) dont je recommande la lecture et la méditation :
« Brejnev pourrit lentement dans le siège suprême. Le parti se corrompt ; il ne se dévoue plus aux objectifs du communisme, mais veut jouir du pouvoir et jouir des richesses. Il sort de l’irréalité et rentre dans la réalité dévastée par ses soins, où il ne trouve, mais en abondance, que des biens grossiers, que l’art n’orne jamais, vodka, datchas et grosses voitures. Quant au peuple, il croupit dans la portion de réalité qui lui a toujours été concédée, l’aménage comme il peut, se désintéresse d’un régime qui ne lui offre même plus la consolation de la chute des puissants et l’occasion de leur place à prendre. La dégradation générale atteint son comble. Quand une chiquenaude aléatoire fait s’écrouler le château de cartes, qui aurait pu s’écrouler beaucoup plus tôt ou beaucoup plus tard, on découvre le paysage post-communiste : maffieux et demi-clochards qui n’ont plus d’énergie, même pour se souvenir. »
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