La liberté selon la Bible
Armand Laferrère maintient avec éclat la tradition, si française, des hauts fonctionnaires lettrés et philosophes. Normalien, énarque, président d’Areva au Canada, en Russie, au Japon, il n’oublie pas de penser par lui même. Donc à contre-courant.
Son précédent essai, L’Amérique est-elle une menace pour le monde ? , paru en 2008 chez Lattès, bousculait, un à un, les mythes américanophobes, de droite ou de gauche. Avec la Liberté des hommes, lecture politique de la Bible, qui vient de sortir chez Odile Jacob, il s’en prend à un autre sophisme à la mode : l’idée que le monothéisme biblique, et par voie de conséquence la tradition judéochrétienne, serait la matrice de tous les totalitarismes. « Le principal inconvénient de telles déclamations, note-t-il, est qu’elles s’appuient sur une lecture que l’on peut courtoisement décrire comme prodigieusement superficielle. »
La Bible, Laferrère la connaît intimement. Né dans une famille calviniste, il l’a découverte dans la célèbre traduction de Louis Segond, un pasteur genevois du XIXe siècle. Avant de redéchiffrer l’Ancien Testament dans l’original hébreu. Et d’affiner enfin son approche à travers l’archéologie, l’anthropologie et la critique des textes. Livre des Livres, ou plutôt bibliothèque rassemblant des récits, des chroniques et des lois rédigés pendant un millénaire au moins, la Bible, c’est vrai, parle autant de politique que de Dieu. Mais qu’enseigne-t-elle ? La théocratie, la pensée unique, l’Inquisition, voire le génocide, comme le soutiennent un Richard Dawkins ou un Michel Onfray ? Non, la liberté. Comme idéal. Et comme méthode.
Cela se vérifie à chaque page, à chaque verset. Et cela tient à un thème clé : l’Exode, la libération des Hébreux après un long esclavage en Égypte. Sans cesse, la Bible y revient. Sans cesse, les commandements divins, à commencer par le Décalogue, le rappellent. « Grande originalité », note Laferrère, par rapport aux récits fondateurs des autres peuples, qui célèbrent plutôt une origine divine ou des victoires. Et cette mémoire soigneusement entretenue conduit à des révolutions morales si profondes, si irrésistibles, qu’elles forment aujourd’hui notre seconde nature : qu’il s’agisse du repos du septième jour, de l’affranchissement des esclaves et des serfs, ou de l’amour de l’étranger et des plus faibles.
Mais ce que Laferrère tient en définitive pour plus importante encore, c’est la révolution civique que la Bible véhicule.
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