Accueil généreux des migrants ou déclin du courage ?
par Christian Vanneste
L’ouverture des esprits n’implique pas celle des frontières. Les esprits binaires qui remplacent la réflexion par le réflexe opposent brutalement la société ouverte, à construire sans retard et la société fermée, qu’ils confondent volontiers avec la dictature.
L’individu libre de ses mouvements et de ses pensées dans une société aux frontières évanescentes, tel est l’idéal et l’avenir. Les choses ne sont pas aussi simples.
La Hongrie de 1956 voulait certes lever les barrières qui empêchait les Hongrois de sortir et les idées de rentrer. La Hongrie de 2015 installe des clôtures pour limiter les entrées parce que ses dirigeants pensent que l’arrivée massive en Europe d’une population étrangère non seulement par la nationalité mais aussi par la mentalité constitue une menace pour la liberté.
Le paradoxe veut en effet que ce soit justement notre conception ouverte de la société qui est menacée. Une société ouverte est une société tolérante, où le fonctionnement des institutions est transparent, où les individus éclairés et responsables décident rationnellement de leur avenir personnel et collectif. Bref, c’est une société libérale et démocratique.
Ce type de société n’est pas le fruit du hasard. Il est étroitement lié à la culture chrétienne qui favorise la personne par rapport au groupe, et suscite un humanisme fondé sur le respect des personnes. Le rationalisme et l’esprit des Lumières ont prolongé ce mouvement. Tandis que la raison autonomisait davantage les individus par rapport aux dogmes, la résistance salutaire de l’humanisme chrétien empêchait le rationalisme technique d’aller tout droit vers le cauchemar du « Meilleur des Mondes ». Il s’agit donc d’un équilibre qui mérite d’être protégé, y compris par des frontières.
En effet, le risque provient de la rencontre entre deux mouvements contraires.
En effet, le risque provient de la rencontre entre deux mouvements contraires.
L’arrivée massive d’immigrés issus de cultures musulmanes correspond à l’introduction d’un groupe dont les individus ne se fonderont pas dans la population européenne. En provenance de pays qui n’ont jamais connu la démocratie, ils accordent souvent à l’appartenance communautaire une importance que les sociétés européennes négligent de plus en plus.
La religion qui porte ce communautarisme est intrinsèquement totalitaire dans la mesure où loin de séparer le temporel et le spirituel , le politique et le religieux, le royaume d’ici-bas et celui de l’au-delà, elle donne pour mission aux croyants de gagner leur place aux jardins des délices éternels en établissant le règne de leur foi sur la terre par la conquête des esprits et des corps, sans exclure la guerre pour ce faire.
Le contenu de la croyance n’est pas constitué d’un credo et de préceptes moraux qui en découleraient. Il définit avec une précision souvent étroitement déterminée par son origine géographique et historique une manière de vivre, une conception de la société, des rites à accomplir qui sont à l’opposé du message chrétien, de son humanisme et de son universalisme. Dans cette confrontation, on retrouve le choc de la société ouverte et de la société close. Malheureusement, il est à craindre que la première ne résiste pas à ce choc.
D’abord, parce que le dynamisme de l’ouverture, de la libération des esprits par le dépassement des traditions s’est mué en une détestation de celles-ci qui a tourné en haine de soi. Comment espérer séduire ou convaincre l’autre en ne cessant de s’accuser de toutes les turpitudes, en répudiant son passé, et en ne lui offrant que le vide d’une société vouée à la consommation matérielle et au désert spirituel ? Une poussière d’individus décérébrés par un relativisme facile, dont on aura gommé l’identité et l’esprit de résistance, ne fera pas le poids face à une communauté soudée par des convictions, fussent-elles stupides. Celles-ci auront tôt fait de convertir les plus fragiles, ceux qui ont besoin de certitudes et d’encadrement comme nous avons tous besoin d’air.
La liberté de se déplacer, de suivre le culte de son choix, de recevoir « librement » l’enseignement confessionnel, le regroupement familial favoriseront non l’intégration et la dilution, mais au contraire la constitution de contre-sociétés, regroupées dans des quartiers, conservant ou accentuant des comportements différents de la majorité autochtone, professant des obligations sur les relations entre les sexes, l’alimentation, le vêtement ou l’organisation du temps.
D’abord, parce que le dynamisme de l’ouverture, de la libération des esprits par le dépassement des traditions s’est mué en une détestation de celles-ci qui a tourné en haine de soi. Comment espérer séduire ou convaincre l’autre en ne cessant de s’accuser de toutes les turpitudes, en répudiant son passé, et en ne lui offrant que le vide d’une société vouée à la consommation matérielle et au désert spirituel ? Une poussière d’individus décérébrés par un relativisme facile, dont on aura gommé l’identité et l’esprit de résistance, ne fera pas le poids face à une communauté soudée par des convictions, fussent-elles stupides. Celles-ci auront tôt fait de convertir les plus fragiles, ceux qui ont besoin de certitudes et d’encadrement comme nous avons tous besoin d’air.
La liberté de se déplacer, de suivre le culte de son choix, de recevoir « librement » l’enseignement confessionnel, le regroupement familial favoriseront non l’intégration et la dilution, mais au contraire la constitution de contre-sociétés, regroupées dans des quartiers, conservant ou accentuant des comportements différents de la majorité autochtone, professant des obligations sur les relations entre les sexes, l’alimentation, le vêtement ou l’organisation du temps.
Par un beau paradoxe, la liberté de la société ouverte aura précipité la fin de celle-ci. C’est donc par un autre paradoxe qu’il faut écarter le risque : la liberté a besoin d’être protégée, et elle doit l’être par des frontières qu’on ne peut franchir sans restriction.
La société ouverte doit séduire « de loin », comme c’était le cas lorsque l’occident faisait rêver les sujets de l’empire soviétique. Les poignées de ceux qui gagnaient le monde libre ne l’envahissaient pas mais s’y glissaient d’autant plus facilement qu’ils en étaient déjà mentalement proches. A la longue, le système fermé a implosé. Le printemps des régimes communistes européens a eu lieu.
Le « printemps arabe » tout au contraire a vu s’effondrer des dictatures qui, loin de laisser place à la démocratie, ont abandonné le terrain au fanatisme et au désordre. Ce sont deux menaces qu’il faut combattre plutôt que de voler à leur secours en les invitant à nous envahir.
Soljenitsyne dénonçait le déclin du courage dans son Discours de Harvard et fustigeait les « fonctionnaires politiques et intellectuels manifestant… de l’irrésolution… face à l’internationale de la terreur ». La lucidité de l’écrivain russe éclaire le débat actuel entre la prétendue générosité des uns et le réalisme des autres, entre les Merkel, Juncker, Hollande et Viktor Orban.
Soljenitsyne dénonçait le déclin du courage dans son Discours de Harvard et fustigeait les « fonctionnaires politiques et intellectuels manifestant… de l’irrésolution… face à l’internationale de la terreur ». La lucidité de l’écrivain russe éclaire le débat actuel entre la prétendue générosité des uns et le réalisme des autres, entre les Merkel, Juncker, Hollande et Viktor Orban.
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