Devoir de désobéissance civile ?
Écrit par RIGNAC Paul
À l’heure où des centaines de milliers de migrants se pressent aux portes de l’Europe, il ne manque pas de "belles consciences" pour rappeler aux Européens leur devoir d’accueil et d’aide humanitaire envers ces populations déplacées. Ce n’est pas nouveau. Quand autrefois les dictatures staliniennes d’Asie, encouragées et soutenues par d’autres "belles consciences" occidentales, déversaient en Mer de Chine des millions de boat people, ma famille, mes amis et moi-même étions en première ligne pour accueillir ces "migrants" d’un autre temps. Accueillir l’étranger en détresse, oui, c’est très bien. Mais ignorer d’autres détresses quand elles frappent seulement à la porte d’en face ou à celle d’à côté, est-ce concevable ? C’est pourtant bien ce qui se passe.
Mon épouse, cadre à la retraite, se dévoue depuis des années dans une association qui, à titre bénévole, vient en aide à Pôle Emploi pour l’accueil des personnes victimes du chômage. Les nouvelles normes technocratiques imposent en effet un tel temps de travail administratif au personnel de Pôle Emploi, que ce dernier n’a souvent plus le temps de rencontrer les chômeurs… Cette tâche a donc été parfois confiée à des intervenants extérieurs bénévoles.
Certaines catégories professionnelles ont déjà été complètement "délocalisées" et "dématérialisées". Ainsi, les Intermittents du Spectacle de toute la France ont-ils été récemment regroupés à Nanterre où il leur est interdit de se rendre "matériellement". Ils n’ont droit qu’à des contacts virtuels par le biais de l’informatique. Une communication téléphonique, virtuellement possible, relève du parcours du combattant, d’un répondeur automatique à un autre. Eh bien, ce système où le mot "accueil" a été rayé de la carte, ce système totalement débile, désincarné, inhumain, absolument inefficace et scandaleux, est en passe d’être généralisé à tous les chercheurs d’emploi !
En cette belle et très moralisatrice rentrée 2015, où l’on a à la bouche que "l’accueil de l’autre", Pôle Emploi vient de signifier à mon épouse qu’à partir de maintenant, il n’y aura plus d’accueil des chômeurs. Hors rendez-vous exceptionnels, les "dialogues" seront essentiellement "dématérialisés". Les services de bénévoles ne seront donc plus requis. Circulez, il n’y a plus de chômeurs à voir !
L’annonce de cette décision aberrante intervenait après une série d’entretiens avec des demandeurs d’emploi dont la détresse avait bouleversé les intervenants bénévoles, pourtant habitués à affronter les situations les plus insoutenables. Imaginez un trentenaire dans la force de l’âge, mais sans qualification particulière, sortant de prison après avoir connu une adolescence chaotique, privé de permis de conduire et sachant à peine taper une adresse mail sur un clavier : ce jeune homme en perdition ne rencontrera plus, dans ses premières démarches, aucun interlocuteur, aucun formateur, mais seulement un robot par l’intermédiaire d’un clavier et d’un écran. Le mieux qu’il pourra espérer sera éventuellement un entretien par le logiciel informatique Skype ! Mais où sommes-nous ? Où nous ont conduit les imbéciles criminels de la technostructure qui nous gouverne ?
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