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domingo, 12 de julio de 2015

Europe recherche identité désespérément


Pourquoi l’Union ne sortira pas de la crise grecque sans savoir qui elle veut être

Chantal Delsol - Eric Deschavanne - Christophe Bouillaud
Si des pages et des pages ont été écrites sur le sujet, il est toujours difficile de définir ce qui constitue l'identité européenne. Socle culturel commun mais aussi projet politique unique en son genre, l'Europe traverse une crise qui l'obligera à définir ce qu'elle est : une vraie communauté ou bien un simple club de pays économiquement performants.


Atlantico : Vue de l'étranger (des Etats-Unis, de Chine ...) l'Europe apparaît comme un ensemble culturel, avec des marqueurs identitaire forts. Pourtant, sur place, nous avons du mal à définir ce qui constitue "l'identité européenne". Quels pourraient être les éléments qui en seraient constitutifs ? Et pourquoi nous est-il si difficile de les définir ?

Chantal Delsol : Il vaut mieux parler de l’identité occidentale car les deux Amériques font partie du même ensemble culturel que nous, né en Europe. C’est une culture très différente des autres, marquée par deux caractéristiques singulières : une vision du temps en flèche et une idée de l’humain comme personne. Le temps en flèche vient de l’idée de Salut du judéo-christianisme et engendre l’idée de progrès. L’être humain comme personne vient du récit de la création du judéo-christianisme et engendre un respect particulier de l’individu, qui tout à la fin devient l’individualisme actuel.

Les idées de liberté, de conscience personnelle et de démocratie sont liées à l’idée de personne et de progrès. De même le déploiement de la science suscitant la technique et la transformation du monde. L’idée de vérité, liée à la recherche de l’universel, est aussi typiquement occidentale. Il y a donc ici, comme d’ailleurs dans chaque culture, une espèce particulière d’humanisme, une espèce particulière de morale, une espèce particulière de politique...

Eric Deschavanne :

En plus du socle culturel commun, l'Europe entend aujourd'hui se définir par rapport au projet politique qu'elle porte. Pourtant, aujourd'hui on voit seulement un assemblage de pays et d'identités, qui ont parfois du mal à s'entendre. Qu'est-ce alors qu'être "européen" ? A quoi pourrait ressembler une "nation" européenne ?

Chantal Delsol : La diversité est par excellence propre à notre culture, puisqu’elle sous-entend la liberté. Il ne faut donc par rêver d’une nation européenne. Ce serait la mort de l’Europe. Nous pourrions nous entendre sur nos points communs que j’ai cités rapidement ci-dessus. Mais il y a une manière française, allemande, saxonne, polonaise, hongroise etc de comprendre la liberté de la personne. Respectons tout. On ne peut s’améliorer qu’en entendant les différences.

Eric Deschavanne :

Christophe Bouillaud : Tout d’abord, il existe au sein même des traités européens de très fortes indications sur ce que l’Union européenne s’engage à faire pour ses ressortissants. Il suffit de lire les préambules des actuels TUE (Traité de l’Union européenne) et TFUE (Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne), tels qu’ils résultent du Traité de Lisbonne. L’UE y réaffirme en particulier ses objectifs en matière sociale ou en matière environnementale. Les traités désignent de fait en creux un objectif : tous les pays européens devraient converger à terme vers un modèle "scandinave" de société et d’économie, à la fois libéral, social, écologique, et aussi sécuritaire. C’est assez logique parce qu’à l’échelle mondiale, les pays scandinaves sont presque toujours ceux où, en termes relatifs, tout se passe bien selon presque tous les indicateurs disponibles. Ensuite, ce modèle libéral en économie et libertaire dans les mœurs, avec une pincée résiduelle de social et une grosse louche de contrôle de la déviance, est bien celui qui l’emporte dans l’Europe dominante, économiquement et politiquement, du nord-ouest du continent, à la fois du point de vue partisan (par exemple au sein du Parlement européen) et du point de vue de l’opinion publique en général. L’adoption par référendum du mariage homosexuel dans la "très catholique Irlande", pour user d’un cliché, est une illustration de ce qui rassemble les Européens et qui les oppose à une grande partie du reste du monde.

J’aurais donc tendance à dire que l’Union européenne possède un centre entre Londres, Paris, Stockholm, Munich et Berlin, qui détermine ce qui constitue l’identité de la nation européenne possible. En effet, le reste de l’Europe est difficilement pensable du point de vue de cette Europe dominante autrement qu’en termes de retards sur les acquis de ce centre : c’est là que l’on produit le plus de richesses, c’est là qu’on fait de la Science et de la Recherche appliquée, c’est là qu’on innove, c’est là que les droits des femmes sont les mieux garantis et où elles travaillent le plus, c’est là où on peut organiser une Gay Pride sans difficultés, etc. En ce sens, on remarquera d’ailleurs que la Grèce se trouve à l’opposé géographique de ce centre, une périphérie où, par exemple, la religion orthodoxe demeure une puissance économique, politique et sociale.

Or ce qui se passe en Grèce, contrairement à ce que certains disent pour accabler les Grecs, peut être interprété de la part de l’électorat grec comme une volonté de se rapprocher du modèle représenté justement par ce centre européen. Le rejet des très clientélistes PASOK et Nouvelle démocratie au profit des gauchistes de Syriza devrait être vu partout comme une victoire de l’identité européenne – puisqu’en Grèce les vrai anti-européens sont les nazillons d’Aube dorée et les staliniens du KKE. Malheureusement, pour des motifs de politique intérieure, à l’Allemagne en particulier, mais aussi à l’Espagne, les politiciens du PPE et du PSE préfèrent nier la nouveauté que représente Syriza et n’y voient au mieux qu’un néo-PASOK, responsable de tout le passe clientéliste grec.

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