Et Cameron donna l'explication la plus claire du terrorisme et de l'extrémisme jamais osée par un leader politique... mais pourquoi tant de réticences en France à dire la même chose ?
par Guylain Chevrier et Ghaleb Bencheikh
Le premier ministre britannique s’exprimait à l'occasion de la présentation de son plan de lutte contre l’extrémisme et le terrorisme à Birmingham.
A ttravers un discours ferme, David Cameron s’est exprimé lundi 20 juillet sur la lutte contre le radicalisme islamique et le terrorisme. Le premier ministre britannique s’est employé à attaquer certaines explications populaires qui considèrent que le terrorisme est le produit de la pauvreté, du manque d’éducation, voire même, d'une maladie mentale. Son discours balaye ces arguments en objectant que bien des terroristes avaient grandi dans des familles prospères et suivi un enseignement dans des universités occidentales.
Alors que la société britannique repose sur un système communautariste, David Cameron n’a pas hésité à pointer du doigt les dangers de la ségrégation qui favorise la diffusion d’une idéologie extrémiste et le processus de radicalisation : "Nous devons nous pencher sur le problème de la ségrégation, car lorsque les gens grandissent et sont scolarisés entre eux, sans contact avec des personnes de milieux différents, cela conduit à la division" a-t-il précisé, tout en notant "de nombreuses voix musulmanes fortes, positives".
Certaines chaînes étrangères sont également responsables de ce fondamentalisme religieux et de la violence qui en découle, à travers la diffusion « de contenu extrémiste » et une large place accordée dans les programme aux « prêcheurs de haine ».
Le chef des conservateurs souhaite, d’ici la fin de l’année, responsabiliser les communautés syriennes, irakiennes et kurdes de Grande-Bretagne afin qu’elles se mobilisent de manière explicite contre la violence.
Intraitable face à l’Etat islamique, David Cameron a promis d’aider les parents craignant que leurs enfants partent au combat rejoindre Daesh. 700 Britanniques combattraient aux côtés de l’organisation terroriste en Irak et en Syrie. Sur demande des parents, le passeport de leurs enfants pourra leur être retiré afin de les empêcher de quitter le territoire britannique.
Ce discours de David Cameron tranche avec les propos de Barack Obama, qui, dans son discours de l’état de l’Union le 20 janvier dernier refusait de prononcer les mots islam radical ou islamisme, au grand regret de certains observateurs. François Hollande soutenait en janvier que les musulmans étaient les "premières victimes du fanatisme, du fondamentalisme, de l'intolérance".
Atlantico : Dans son discours, David Cameron a expliqué que “La pauvreté et les inégalités ne peuvent pas expliquer l'extrémisme violent”. Faisant suite aux attentats de janvier, Manuel Valls notait la présence en France d’"un apartheid territorial, social, ethnique". Il évoquait également "la misère sociale". François Hollande essuie aussi des critiques lorsqu’il parle de fondamentalisme sans prononcer le mot d’islamisme. Pourquoi le gouvernement français ne semble pas vouloir tenir le même discours ?
Ghaleb Bencheikh. L'une des difficultés majeure quant à la définition même du terrorisme, c'est qu'il reste un terme diffus. C'est un sujet complexe, car il y a plusieurs strates de lecture et plusieurs analyses qui se superposent. Aucune d'elles n'épuise à elle seule le sujet: chacune a sa pertinence. Il vaut donc mieux avoir une vision synoptique de la question. Les différents registres de lecture et d'analyses sont les suivant. Nous avons une lecture sociale, psychologique ou psychosociale, millénariste, apocalyptique, une approche théologique, géostratégique, et enfin une vision politique. Quel que soit le bout par lequel on prend ces affaires-là, il y a une certaine pertinence. Mais cela ne suffit pas. Si David Cameron veut se mettre sur le registre du repli, de la ségrégation, du communautarisme, c'est possible, mais ce n'est pas suffisant pour analyser le sujet. Nos lectures, à nous français, pourraient donner un brin de réponse, mais ce n'est pas suffisant non plus. Je pense qu'il y a des raisons extrinsèques au contexte islamiste, et il y a des facteurs endogènes au contexte et à une guerre islamique à proprement dîtes. Cela prendra beaucoup de temps. Ce qui est propre aux sociétés musulmanes c'est la régression.
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