Le brasier. Le Louvre incendié par la Commune
par Didier Rykner
Source: Le Salon Beige
Jamais, en un laps de temps aussi court, Paris n’avait subi un tel traitement. Quelque soixante-dix ans plus tard, même l’occupant allemand se retint au dernier moment et épargna la capitale française du dynamitage de ses plus beaux monuments. Nicolas Chaudun retrace, dans ce court récit, ces quelques jours qui transformèrent en ruines certains des plus beaux trésors architecturaux de Paris et qui faillirent voir la disparition du Louvre.
Certes, une partie des collections du musée, celles considérées comme les plus précieuses, avaient été évacuées en septembre 1870. Les fleurons de la Renaissance italienne, notamment, étaient à l’abri. Mais sans ces héros modestes et oubliés que furent Joseph-Henri Barbet de Jouy, conservateur du musée, et Bernardy de Sigoyer, commandant de l’armée officielle, Le Radeau de la Méduse de Géricault, Le Sacre de David ou La grande Odalisque d’Ingres, des centaines d’œuvres par les plus grands peintres français des XVIIIe et XIXe siècles, les tableaux des écoles flamande et hollandaise, qui font aujourd’hui la gloire du musée, auraient terminé en fumée.
Choisissant la forme du récit historique qui se lit comme un roman, Nicolas Chaudun n’invente rien, cependant. Il s’est basé sur les témoignages et les archives de l’époque – dont celles des sapeurs-pompiers que personne n’avait songé jusqu’ici à consulter – pour retranscrire de la façon la plus vivante et la plus exacte possible ces moments de folie.
La folie, ce fut bien sûr celle des Versaillais dont il ne cache pas la réelle barbarie : tous les insurgés pris les armes à la main ou dont on soupçonnait sur la foi d’un jugement expéditif qu’ils avaient pris part aux combats, étaient passés par les armes sans aucune forme de procès. Il confirme bien que ces massacres ne furent pas la réponse aux incendies et qu’ils étaient décidés dès le début de la répression.
Mais il n’occulte pas non plus ce qu’on a du mal à dire aujourd’hui sans passer pour un ennemi du peuple : la barbarie fut également du côté des fédérés. Barbarie envers les hommes puisqu’ils massacrèrent aussi, mais surtout barbarie envers la culture et l’art. Pas davantage que les assassinats des troupes de Thiers ne furent causés par les incendies des monuments, ceux-ci ne servirent à répondre aux massacres. La destruction de Paris fut décidée très tôt, lorsque la Commune comprit que sa défaite n’était qu’une question de jours. Il fallait donc supprimer, symboliquement, tout ce qui pouvait rappeler ce qu’ils combattaient. La politique de la terre brûlée.
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