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sábado, 9 de mayo de 2015

Poutine seul pour ses célébrations de 1945


Pourquoi Moscou et Bruxelles auraient peut-être intérêt à se souvenir que l’Europe peut aller de l’Atlantique à l’Oural


Ce samedi, les Russes commémorent les 70 ans de leur victoire de 1945 sur l’Allemagne nazie. Un évènement très important dans la conscience nationale et pour lequel Vladimir Poutine a vu les choses en grand. Le président russe a convié 68 chefs d’Etat et de gouvernement, et pourtant aucun président ou Premier ministre occidental n’a souhaité s’y rendre.

Atlantico : Ce samedi, les Russes commémorent les 70 ans de leur victoire de 1945 sur l’Allemagne nazie. Un évènement très important dans la conscience nationale et pour lequel Vladimir Poutine a vu les choses en grand. Le président russe a convié 68 chefs d’Etat et de gouvernement, et pourtant aucun président ou Premier ministre occidental n’a souhaité s’y rendre. Qu’est-ce que cela révèle de l’isolement du pays sur la scène internationale ?

Michael Lambert : Les derniers évènements en Ukraine et en Moldavie, auxquels s’ajoutent la crainte d’une potentielle guerre hybride dans les pays Baltes, ont mis à mal l’idée que Moscou puisse diplomatiquement et culturellement se rapprocher de Bruxelles et Washington. A ces tensions, s’ajoute la rupture flagrante entre la perception historique de la Seconde Guerre mondiale par les occidentaux et les eurasiens. Les Européens de l’Ouest perçoivent la chute du Nazisme comme un élément fondateur de leur identité, à l’épicentre du souhait d’instaurer une paix durable sur le continent. La commémoration relate une expérience commune traumatisante qui pousse à se rapprocher les uns des autres.

A l’inverse, cette dernière décennie à été l’occasion pour le Président russe d’instrumentaliser cette période afin de justifier la mise en place de certaines des réformes. La Seconde Guerre mondiale, présenté en Russie comme la “Grande Guerre Patriotique”, ne commémore pas la victoire de la démocratie mais celle de l’Union soviétique sur l’Allemagne Nazie, et plus généralement sur tous les pays qui furent sous tutelle allemande, autrement dit les actuels membres de l’Union européenne. L’Histoire s’impose alors comme élément fondateur, mais dans un objectif de rappeler la puissance russe par rapport à la faiblesse des démocraties du continent.

Le contraste s’opère alors sur le perception des régimes totalitaires, avec les occidentaux qui considèrent le nazisme et le communisme avec une vision péjorative. Tandis que les russes cultivent une vision positive vis-à-vis du rôle de Staline, justifiant même les déportations de masse. Rappelons que Poutine présente la chute de l’URSS comme “la plus grande catastrophe géopolitique du XXème siècle”. La victoire de l’Union soviétique, comme le décrivait la sociologue Lev Gudkov, est perçue comme une victoire sur l’Allemagne nazie, mais plus généralement sur l’Ouest. En 2010, le Président russe avançait même l’idée que la guerre aurait pu être gagnée avec les seule troupes russes, sans l’aide des Ukrainiens, dans la mesure ou 70% des morts sont d’origine russe, ce qui constitue objectivement une mise en avant de l’importance de la Russie en tant que puissance apte à s’émanciper sans aide extérieure.

Ces éléments éloignent les Européens et les Russes. En janvier 2015, lors d’un sondage du Centre Levada, 52% des personnes ont répondu que Staline avait joué un rôle positif dans l’histoire du pays, soit 10% de plus qu’en 2006. A ce jour, plus de 37% des russes souhaitent la création de monuments pour rappeler l’importance de Staline commune figure commune. Un autre exemple frappant est le bonne perception de l’URSS par les citoyens russes, on le constate lors des Jeux Olympiques de Sotchi en 2014, ou la période d’industrialisation rapide est mise en avant comme une réussite nationale, sans évoque les déportations massives.

L’isolement de Moscou n’est donc pas uniquement lié à l’annexion de la Crimée, le conflit en Ukraine, ou encore le danger que celle-ci représente pour la stabilité sur le continent, mais à l’instrumentalisation de l’Histoire, qui ne s’accorde pas avec la représentation des pays occidentaux, et n’incite pas ces derniers à y assister.

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