Un Divorce à l’amiable
Par Brad Miner
Si vous venez à New York pendant les derniers jours de congé, vous pourriez envisager de vous rendre au Pearl Theatre, à l’ouest de Times Square, pour assister à une représentation de The Great Divorce (« Le Grand Divorce »), une adaptation du livre de même titre de C.S.Lewis.
La pièce est mise en scène par le Fellowship for the Performing Arts (FPA), une troupe chrétienne qui donna précédemment une très belle version, qui est restée longtemps à l’affiche (et qui a beaucoup tourné) de (« La Tactique du diable »). Max McLean, l’original Off-Broadway Screwtape, et Brian Watkins ont pris le Divorce et en ont fait une représentation à trois acteurs – elle ne dure que 90 minutes – qui saisit avec grande finesse l’esprit des méditations de C.S.Lewis sur le pourquoi de l’existence du ciel et de l’enfer et sur ceux qui y vont.
C’est en fait une glose de Dante, Milton, Blake et Bunyan – de la Divine Comédie, du Paradis perdu, du Mariage du ciel et de l’enfer et du Voyage du pèlerin. Lewis bien sûr était protestant, bien qu’appartenant à cette variété de fidèles à l’intérieur de l’Eglise d’Angleterre qui s’appelle elle-même anglo-catholique. Si vous ne le saviez pas, vous le déduiriez du Great Divorce qui affirme qu’entre le ciel et l’enfer il y a quelque chose d’autre.
Or Lewis exprimait ailleurs (Lettres to Malcolm ; Chiefly on Prayer, « Si Dieu écoutait : lettres à Malcolm sur la prière ») ce qu’aucun protestant fondamentaliste ne pourrait faire, car ils croient que ceux qui ont passé sont ou damnés ou sauvés, aussitôt morts. « Bien sûr je prie pour les morts », écrivit Lewis : « Cet acte est si spontané, si pratiquement inévitable, que seul une interdiction théologique la plus impérative pourrait m’en détourner. Et j’ai du mal à imaginer comment mes autres prières subsisteraient si celles pour les défunts étaient interdites. »
Effectivement il écrivit une fois à une amie pour lui demander de lui rendre visite au purgatoire. C’est peut-être pourquoi quand j’ai demandé à quelques amis protestants s’ils avaient lu les Chroniques de Narnia ou The Screwtapes Letters, ils disent qu’ils n’ont même jamais entendu parler de C.S.Lewis. Simplement il était trop « High Church ».
Pour ceux qui ne sont pas familiers avec The Great Divorce, c’est l’histoire d’un voyage en bus qui commence dans The Grey Town (« La ville grise ») et mène ses passagers dans la banlieue – les contreforts – du ciel. Nous apprenons que dans cet univers sombre, les gens ne cessent de s’éloigner les uns des autres, si bien que les espaces qui les séparent s’agrandissent toujours. Là, vous pouvez avoir ce que vous désirez ; seulement il n’y a jamais assez.
Quand notre narrateur sort du bus (c’est Lewis, je suppose – l’acteur a pris sa ressemblance ressembler, et celle-ci est aidée par une grande photo de Lewis qui apparaît sur une grande toile de fond au début de la pièce), il fait l’expérience – comme tous les passagers – de ce que nous pourrions appeler l’insupportable légèreté du premier être dans le ciel.
C’est vrai que dans le livre de Lewis cette légèreté fantomatique rend la solidité brute de ce paradis hiérarchisé réellement douloureuse – les brins d’herbe percent vos pieds nus. Dans la mise en scène cependant les acteurs passent beaucoup de temps à sautiller précautionneusement et expriment trop souvent leur malaise. On comprend la chose - la drôlerie – dès le début, après quoi cela devient (pour moi en tout cas) répétitif et lassant.
Notre narrateur – dans la représentation j’ai vu qu’il était joué par Joe Rainwater – écoute la plupart du temps les récits des malheurs des autres passagers, dont la plupart rapidement se dirigent vers l’arrêt de bus pour retourner à la Grey Town. Mais le narrateur a plus de chance parce qu’il reçoit les conseils de Georges MacDonald, le grand écrivain écossais dont l’œuvre a été à l’origine de la propre conversion de Lewis. (G.K. Chesterton aussi admirait l’œuvre de MacDonald, et ce fut The Everlasting Man (« L’Homme éternel ») de G.K.C. dont Lewis a toujours dit qu’il l’avait incité à retourner au christianisme. Vraiment, Lewis emprunta le titre de son plus grand livre à une phrase de Chesterton : Mere Christianity (« Simple christianisme »).
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