sábado, 22 de febrero de 2014

Pour comprendre le pape François, il faut retenir trois choses....



“Le pape François est inclassable”



Entretien. Journaliste, Nicolas Diat est aujourd’hui l’un des meilleurs connaisseurs du Vatican. Son livre sur Benoît XVI, “l’Homme qui ne voulait pas être pape”, est le fruit d’une enquête minutieuse et scrupuleuse.

L'Homme qui ne voulait pas être pape


On a tendance à opposer le pape François à son prédécesseur, Benoît XVI. Le premier est réputé progressiste, quand l’autre était jugé conservateur. Qu’en pensez-vous ?

Il s’agit d’une opposition purement médiatique. J’en veux pour preuve le conclave de 2005. On a présenté Bergoglio comme le challenger de Ratzinger, mais il n’y a jamais eu de challenge ! C’est malgré lui qu’on a fait du cardinal de Buenos Aires le candidat du camp progressiste. D’une part, il jugeait indécent de s’opposer à l’élection d’un homme dont il appréciait la bonté et les qualités intellectuelles. Par ailleurs, le camp progressiste n’était pas uni. Bergoglio est un jésuite, mais il n’a jamais approuvé la ligne réformiste du supérieur général de l’époque, Pedro Arrupe, qui s’est traduite en Amérique latine par un soutien plus ou moins explicite à la théologie de la libération. Bergoglio n’est pas un idéologue, il n’est l’homme d’aucune faction. Il est tout simplement inclassable.

Pourquoi Bergoglio accepte-t-il son élection en 2013, alors qu’il a découragé ses soutiens en 2005 ?

Parce que les temps ont changé. En 2005, l’émotion planétaire soulevée par la mort de Jean-Paul II pousse à l’élection de son plus proche collaborateur, Joseph Ratzinger, dont la légitimité s’impose presque naturellement. Les cardinaux choisissent la continuité. En 2013, le choc suscité par la renonciation de Benoît XVI crée un tout autre climat : c’est un conclave de rupture qui s’ouvre en mars. Cette rupture ne porte pas sur l’enseignement de l’Église mais sur sa gouvernance.

Benoît XVI espérait faciliter la réforme de la curie en renonçant à sa charge. L’élection de François répond-elle à ses attentes ?

Benoît XVI a maintenu, développé, approfondi le magistère. Mais a-t-il gouverné ? Le seul acte de gouvernement qu’il ait posé, n’est-ce pas la renonciation de 2013 ? Joseph Ratzinger est un homme d’une douceur et d’une abnégation telles qu’il prend tout sur lui. Jamais il ne sévit, jamais il n’écarte. Quand on porte à ce point les fautes des autres, cela devient épuisant. Et cela crée forcément une situation de blocage institutionnel. Sur ce point, François est très différent de Benoît. C’est un jésuite à l’ancienne, qui décide, qui tranche sans hésiter — un peu comme un directeur de collège jésuite : il faut que l’établissement soit bien tenu !

N’êtes-vous pas trop sévère avec Benoît XVI ? Sur la pédophilie, il a su trancher ! Et il a prouvé, par le motu proprio sur la liturgie romaine, qu’il était capable de décisions audacieuses.

Oui, mais ces deux exemples, importants il est vrai, ne relèvent pas de la gouvernance de la curie. Sa détermination sur la pédophilie s’explique par son rapport à la vérité, elle relève de son ecclésiologie. Pour Benoît XVI, le plus important, c’est que la vérité advienne, même si l’institution doit en souffrir. En l’occurrence, cette vérité éclate malgré les blocages de la curie. C’est aussi malgré la curie qu’il prend lemotu proprio Summorum pontificum, rédigé dans le plus grand secret : sa traduction a même été confiée à des services extérieurs à la secrétairerie d’État pour qu’il n’y ait pas de fuite avant sa publication !

Pourquoi la réforme de la curie est-elle aussi importante ?

La curie telle que nous la connaissons encore aujourd’hui a été structurée par Paul VI dans les années 1970. Elle a très bien fonctionné pendant plusieurs années. Les choses se sont dégradées sous Jean-Paul II, d’abord à cause de divergences géopolitiques. La secrétairerie d’État s’accommodait des régimes communistes, alors que Wojtyla pressentait qu’ils allaient s’effondrer. Au lieu de la réformer, Jean-Paul II prend l’habitude de contourner la curie, qui se transforme en bureaucratie. C’est une machine paralysée dont hérite Benoît XVI en 2005. Aujourd’hui, l’ambition de François est de remettre la curie au service de l’Église. On sait désormais qui est le chef !

C’est un pape latino-américain. A-t-il conscience des difficultés de l’Église en Europe ?

Bergoglio venait rarement à Rome, et il est certain qu’il a beaucoup moins voyagé que ses deux prédécesseurs. Pour le comprendre, il faut retenir trois choses. D’abord, il est fils d’immigré, ce qui peut expliquer son intérêt pour la question migratoire, comme en témoigne son déplacement à Lampedusa. Ensuite, c’est un Sud-Américain et l’Église de ce continent reste une force populaire : elle participe activement à tous les débats de société. Ainsi, François n’a pas hésité à envoyer un message de soutien aux manifestants qui défilaient à Paris en faveur de la vie. De même, il a convoqué un premier synode pour la famille, qui se déroulera en octobre. Il y sera question, notamment, des divorcés et des remariés. Sur ce sujet, le pape a manifestement tendance à ne pas mésestimer les problèmes pastoraux même s’il ne faut pas imaginer une révolution en marche. Certains progressistes risquent d’être très marris… Enfin, l’Église sud-américaine est une Église ultra-missionnaire, ce qui n’est plus le cas en Europe. Même s’il a peu parlé des vocations depuis un an, François est très sensible à la nouvelle évangélisation que prônait Jean-Paul II.

Que pense-t-on de la France à Rome ? Et des projets de François Hollande ?

La mobilisation en faveur du mariage et de la famille a surpris très favorablement le Vatican. On y a vu la réponse à l’apostrophe de Jean-Paul II au Bourget, en 1980 : « France, fille aînée de l’Église, qu’as-tu fait des promesses de ton baptême ? » Le Bourget, c’est un peu le lieu de naissance de La Manif pour tous. Benoît XVI a creusé ce sillon. En fait, la prière du 15 août 2012 que le cardinal Vingt-Trois a fait lire à tous les prêtres de notre pays a constitué une véritable bombe. Je remarque d’ailleurs que l’archevêque de Paris fait l’admiration de nombreux prélats européens pour la vigueur et la subtilité de sa stratégie. Le Vatican est donc très attentif à ce qui se passe en France. Le pape a minutieusement préparé la visite de François Hollande. Avec son ministre des Affaires étrangères, le Français, d’origine corse, Mgr Dominique Mamberti, le Saint-Père a fait passer des messages : on a trop peu souligné que le recul du gouvernement sur la loi famille suivait de très peu cette rencontre…









Le Père Lombardi critique le livre de Nicolas Diat sur le pontificat de Benoît XVI


Des accusations «graves» et parfois «sans fondement». C'est ainsi que le Père Federico Lombardi, directeur du Bureau de presse du Saint-Siège, a critiqué, le 18 février 2014, le livre du Français Nicolas Diat, «L’homme qui ne voulait pas être pape». L'ouvrage, qui analyse le pontificat de Benoît XVI, s'en prend à certains prélats du Saint-Siège.

Sur le site internet de Radio Vatican, Le Père Lombardi a d’abord jugé que l’auteur avait relu avec intelligence et profondeur l’enseignement magistériel du pontificat de Benoît XVI. Le porte-parole du Vatican a en revanche apporté de sérieuses critiques concernant des accusations «graves» et parfois «sans fondement» qui apparaissent dans la partie de l’ouvrage évoquant les vicissitudes du pontificat.

Le Père Lombardi a notamment démenti tout contact entre le majordome infidèle de Benoît XVI, Paolo Gabriele, et le cardinal italien Mauro Piacenza, que l’ouvrage accuse de «trahison». S’il a estimé que ce «travail de longue haleine» offrait de nombreuses informations utiles, le Père jésuite a en même temps déploré la méthodologie de l’auteur de l’ouvrage, en particulier le recours à des témoignages anonymes de cardinaux.


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