sábado, 21 de abril de 2018

Emmanuel Macron: « nous ne sommes pas faits pour un monde qui ne serait traversé que de buts matérialistes »



Macron et l’Église : un discours ambigu

PAR JEAN-PIERRE MAUGENDRE


Le 9 avril dernier, le Président de la République a tenu au Collège des Bernardins, devant les évêques de France, un discours très remarqué. Les catholiques sont tombés sous le charme et les laïcs sous le choc. Cependant ni l’enthousiasme des uns ni les imprécations des autres ne semblent totalement justifiés.

Un éloge inattendu de l’Église

Notons d’abord qu’Emmanuel Macron n’a pas tari d’éloges sur l’Église et son rôle dans la société française, rendant en particulier hommage à son action dans la vie associative au service des plus faibles : « Malades, isolés, déclassés, vulnérables, abandonnés, handicapés, prisonniers ». Le Chef de l’État est allé jusqu’à dresser un tableau élogieux de la vie contemplative « vie de prière et de travail ». Le propos est pour le moins inhabituel même si Nicolas Sarkozy dans son discours du Latran, le 20 décembre 2007, avait déjà rappelé les racines chrétiennes de l’Europe, noté la supériorité du curé sur l’instituteur, en appelant enfin à une « laïcité positive ». Son successeur, de son côté, note opportunément, au rebours de la vulgate officielle, que « nous ne sommes pas faits pour un monde qui ne serait traversé que de buts matérialistes ».

L’Église est, ainsi, appelée à apporter sa contribution à la « politique contemporaine » dont l’urgence est de « retrouver son enracinement dans la question de l’homme » face à ce qui « grève notre pays (…) le relativisme et même le nihilisme ». Cela au titre de la longue tradition qu’elle représente, son expertise en humanité aurait dit Paul VI, mais aussi au regard de son engagement humanitaire. Le Président de la République appelle ainsi les catholiques à s’engager en politique mais en leur rappelant que la voix de l’Église « ne peut être injonctive », elle ne peut être que « questionnante ». Et pour que les choses soient claires, il conclut son intervention par une formule dont la sècheresse contraste avec l’empathie des propos antérieurs : « Je demanderai (à chaque citoyen) de la même façon et toujours de respecter absolument et sans compromis aucun toutes les lois de la République. C’est cela la laïcité, ni plus ni moins, une règle d’airain pour notre vivre-ensemble qui ne souffre aucun compromis, une liberté de conscience absolue ».


Un raisonnement confus


Tout cela apparaît à la fois incohérent et confus. En effet, comment concilier la lutte contre le relativisme et le nihilisme avec l’absolu respect de la loi républicaine qui est, par nature, évolutive et relativiste, puisqu’elle n’est que le fruit des rapports de force électoraux d’un instant. L’évolution de la législation sur l’avortement, ces quarante dernières années, est un exemple aveuglant du relativisme ainsi induit par le primat absolu de la loi positive, considérée comme contraignante et obligatoire si elle a été élaborée selon le processus juridique approprié. Selon la date (avant 1975 ; entre 1975 et 2001 ; après 2001), l’avortement constitue un crime : dès la conception, à partir de 10 semaines ou à partir de 12 semaines, sauf si, bien sûr il s’agit d’une Interruption Médicale de Grossesse, alors légale jusqu’à l’accouchement. À aucun instant, Emmanuel Macron n’emploie les mots au rebours du relativisme que sont : bien, mal, vrai, faux, beau, laid, etc.


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