domingo, 25 de junio de 2017

1804 - Georges Cadoudal refuse la grâce de Napoléon ... 1993 Soljenitsyne évoque le soulèvement de la Vendée

Le 25 juin 1804 : exécution de Georges Cadoudal.


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Georges Cadoudal, le chef de chouannerie, refuse la grâce de Napoléon ; il est guillotiné place de Grève à Paris, après avoir prononcé la devise des insurgés vendéens : "Mourons pour notre Dieu et notre Roi".

Fils de Louis Cadoudal et de Jeanne Le Bayon, Georges naît le jour de l'an 1771 à Kerléano, petit village près d'Auray. Ce fils de meunier pense un moment entrer au séminaire, il fait ses études au Collège de Vannes. Lorsqu'en 1793, Danton et la Convention décrètent la levée en masse, Cadoudal refuse de se soumettre et participe à l'embrasement de la Bretagne royaliste. Il décide alors de rejoindre la Grande Armée Catholique et Royale de Vendée et se place sous les ordres de Stofflet. En 1795, Cadoudal prend le commandement des chouans du Morbihan. Devenant commandant de la Division d'Auray, le Morbihan en compte onze, Cadoudal mène de nombreuses actions qui paralysent les Bleus dans tout l'Ouest du Morbihan. Toute cette partie du département est sous son contrôle. Cadoudal rejette le cessez-le-feu conclu La Mabilais et continue seul le combat.

Furieux et impuissant face à l'échec du débarquement de Quiberon, Cadoudal se replie avec ses hommes. Il reprend tout de même Sarzeau à la fin1795 et Locminé en avril 1796. Hoche le force à accepter la paix. Nommé Commandant de l'Armée Catholique et Royale du Morbihan par le Comte de Provence, le futur Louis XVIII, Georges Cadoudal reprend le combat le 4 septembre 1797.
En février 1799, Cadoudal est invité à Paris par le Premier Consul Bonaparte à signer une paix définitive. L'entrevue est un échec et la guerre reprend. Cadoudal participe à l'attentat de la rue Saint-Nicaise, dit de la Machine infernale. Si Bonaparte en sort sain et sauf, la bombe fait vingt-deux tués. Réfugié en Angleterre, il revient à Paris avec trois autres hommes pour enlever le Premier Consul: Joyaut, Burbant et Gaillard. C'est au cours de cette action qu'il est capturé.et jugé avec dix autres de ses amis. Le 25 juin 1804, il monte à l'échafaud. Voir les chroniques du 1er janvier et du 21 juin.



Texte intégral du discours prononcé par Alexandre Soljenitsyne,  pour l'inauguration de l'Historial de Vendée .
Samedi 25 septembre 1993, aux Lucs-sur-Boulogne

« M. le président du Conseil général de la Vendée, chers Vendéens,

Il y a deux tiers de siècle, l'enfant que j’étais lisait déjà avec admiration dans les livres les récits évoquant le soulèvement de la Vendée, si courageux, si désespéré. Mais jamais je n'aurais pu imaginer, fût-ce en rêve, que, sur mes vieux jours, j'aurais l'honneur inaugurer le monument en l'honneur des héros des victimes de ce soulèvement.

Vingt décennies se sont écoulées depuis : des décennies diverses selon les divers pays. Et non seulement en France, mais aussi ailleurs, le soulèvement vendéen et sa répression sanglante ont reçu des éclairages constamment renouvelés. Car les événements historiques ne sont jamais compris pleinement dans l'incandescence des passions qui les accompagnent, mais à bonne distance, une fois refroidis par le temps.

Longtemps, on a refusé d'entendre et d'accepter ce qui avait été crié par la bouche de ceux qui périssaient, de ceux que l'on brûlait vifs, des paysans d'une contrée laborieuse pour lesquelsla Révolution semblait avoir été faite et que cette même révolution opprima et humilia jusqu'à la dernière extrêmité.

Eh bien oui, ces paysans se révoltèrent contre la Révolution. C’est que toute révolution déchaîne chez les hommes, les instincts de la plus élémentaire barbarie, les forces opaques de l'envie, de la rapacité et de la haine, cela, les contemporains l'avaient trop bien perçu. Ils payèrent un lourd tribut à la psychose générale lorsque fait de se comporter en homme politiquement modéré - ou même seulement de le paraître - passait déjà pour un crime.

C'est le XXe siècle qui a considérablement terni, aux yeux de l'humanité, l'auréole romantique qui entourait la révolution au XVIIIe. De demi¬-siècles en siècles, les hommes ont fini par se convaincre, à partir de leur propre malheur, de que les révolutions détruisent le caractère organique de la société, qu'elles ruinent le cours naturel de la vie, qu'elles annihilent les meilleurs éléments de la population, en donnant libre champ aux pires. Aucune révolution ne peut enrichir un pays, tout juste quelques débrouillards sans scrupules sont causes de mort innombrables, d'une paupérisation étendue et, dans les cas les plus graves, d'une dégradation durable de la population.

Le mot révolution lui-même, du latin revolvere, signifie rouler en arrière, revenir, éprouver à nouveau, rallumer. Dans le meilleur des cas, mettre sens dessus dessous. Bref, une kyrielle de significations peu enviables. De nos jours, si de par le monde on accole au mot révolution l'épithète de «grande», on ne le fait plus qu'avec circonspection et, bien souvent, avec beaucoup d'amertume.
Désormais, nous comprenons toujours mieux que l'effet social que nous désirons si ardemment peut être obtenu par le biais d'un développement évolutif normal, avec infiniment moins de pertes, sans sauvagerie généralisée. II faut savoir améliorer avec patience ce que nous offre chaque aujourd'hui. II serait bien vain d'espérer que la révolution puisse régénérer la nature humaine. C'est ce que votre révolution, et plus particulièrement la nôtre, la révolution russe, avaient tellement espéré.

La Révolution française s'est déroulée au nom d'un slogan intrinsèquement contradictoire et irréalisable : liberté, égalité, fraternité. Mais dans la vie sociale, liberté et égalité tendent à s'exclure mutuellement, sont antagoniques l'une de l'autre! La liberté détruit l'égalité sociale - c'est même là un des rôles de la liberté -, tandis que l'égalité restreint la liberté, car, autrement, on ne saurait y atteindre. Quant à la fraternité, elle n'est pas de leur famille. Ce n'est qu'un aventureux ajout au slogan et ce ne sont pas des dispositions sociales qui peuvent faire la véritable fraternité. Elle est d'ordre spirituel.

Au surplus, à ce slogan ternaire, on ajoutait sur le ton de la menace : « ou la mort», ce qui en détruisait toute la signification. Jamais, à aucun pays, je ne pourrais souhaiter de grande révolution. Si la révolution du XVIIIe siècle n'a pas entraîné la ruine de la France, c'est uniquement parce qu'eut lieu Thermidor.

La révolution russe, elle, n'a pas connu de Thermidor qui ait su l'arrêter. Elle a entraîné notre peuple jusqu'au bout, jusqu'au gouffre, jusqu'à l'abîme de la perdition. Je regrette qu'il n'y ait pas ici d'orateurs qui puissent ajouter ce que l'expérience leur a appris, au fin fond de la Chine, du Cambodge, du Vietnam, nous dire quel prix ils ont payé, eux, pour la révolution. L'expérience de la Révolution française aurait dû suffire pour que nos organisateurs rationalistes du bonheur du peuple en tirent les leçons. Mais non ! En Russie, tout s'est déroulé d'une façon pire encore et à une échelle incomparable.

De nombreux procédés cruels de la Révolution française ont été docilement appliqués sur le corps de la Russie par les communistes léniniens et par les socialistes internationalistes. Seul leur degré d'organisation et leur caractère systématique ont largement dépassé ceux des jacobins. Nous n'avons pas eu de Thermidor, mais - et nous pouvons en être fiers, en notre âme et conscience - nous avons eu notre Vendée. Et même plus d'une. Ce sont les grands soulèvements paysans, en 1920¬-21. J'évoquerai seulement un épisode bien connu : ces foules de paysans, armés de bâtons et de fourches, qui ont marché sur Tanbow, au son des cloches des églises avoisinantes, pour être fauchés par des mitrailleuses. Le soulèvement de Tanbow s'est maintenu pendant onze mois, bien que les communistes, en le réprimant, aient employé des chars d'assaut, des trains blindés, des avions, aient pris en otages les familles des révoltés et aient été à deux doigts d'utiliser des gaz toxiques. Nous avons connu aussi une résistance farouche au bolchévisme chez les Cosaques de l'Oural, du Don, étouffés dans les torrents de sang. Un véritable génocide.

En inaugurant aujourd'hui le mémorial de votre héroïque Vendée, ma vue se dédouble. Je vois en pensée les monuments qui vont être érigés un jour en Russie, témoins de notre résistance russe aux déferlements de la horde communiste. Nous avons traversé ensemble avec vous le XXe siècle. De part en part un siècle de terreur, effroyable couronnement de ce progrès auquel on avait tant rêvé au XVIIIe siècle. Aujourd'hui, je le pense, les Français seront de plus en plus nombreux à mieux comprendre, à mieux estimer, à garder avec fierté dans leur mémoire la résistance et le sacrifice de la Vendée ».
Alexandre SOLJÉNITSYNE

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