lunes, 21 de noviembre de 2016

François Fillon, c’est Nicolas Sarkozy sans ses défauts, sans ses errements


Tapis rouge pour Fillon


par Erwan Le Morhedec

Bien fol qui exclurait radicalement toute surprise dimanche prochain, après une suite de scrutins à l’étranger et en France qui démontrent suffisamment qu’on ne peut en écarter aucune. Il pourrait encore y avoir une démobilisation. Mais Fillon paraît avoir un tapis rouge devant lui pour remporter la primaire de la droite et du centre. Son avance, la dynamique enclenchée, le soutien de Nicolas Sarkozy et de Bruno Le Maire ne laissent au bout du compte qu’un trou de souris à Alain Juppé.

Hier soir, j’ai vu sans déplaisir se tourner la page d’une certaine façon de concevoir la politique. La recherche du clivage pour le principe, de la polémique pour occuper le terrain et les Français, un certain mépris pour le peuple masqué sous le populisme. Sur le style, François Fillon est à bien des égards l’antithèse de Nicolas Sarkozy et, par contraste, cela offre quelques raisons d’espérer de la politique.

« J’ai changé », voilà qui a probablement été la signature de Nicolas Sarkozy. C’est d’ailleurs dans le changement permanent qu’il a fait la preuve de plus de constance. Parce qu’un revirement, « ça ne coûte pas cher » auprès d’électeurs vus comme quantités négligeables puisqu’éternellement malléables. Ce fut l’ère de la politique conçue comme un stand-up, l’essentiel étant la bonne interprétation du rôle de circonstance que l’on endosse.

Avec Alain Juppé, François Fillon était certainement l’incarnation de l’anti-bling bling et d’une certaine austérité. Les concession speeches de Nicolas Sarkozy, que ce soit celui d’hier ou celui de 2012, sont toujours salués mais ils auront tous deux succédé à des campagnes dans lesquelles il n’a pas sacrifié à la même élégance. Peut-être aurait-il dû prendre acte du fait que les Français attendent encore de leurs politiques cette assurance et cette dignité, plus qu’une illusoire et factice proximité. François Fillon a encore fait preuve d’une constance dans ses convictions trop rare en politique. « La France peut supporter la vérité« , tel était le titre de son livre paru en octobre 2006 : il y a dix ans déjà, il était porteur d’un message similaire et n’avait pas été un petit artisan de la victoire de Nicolas Sarkozy. Il a maintenu cette perspective durant cette campagne, annonçant son programme très en amont, qui ne sacrifie pas à la facilité. Voilà probablement ce que l’on pouvait apprécier le plus dans la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007.

Car François Fillon, c’est aussi Nicolas Sarkozy sans ses défauts, sans ses errements. C’est la réforme sans la double ration de frites. Ce scrutin, c’est encore une leçon pour ceux qui n’auront eu de cesse de penser que la droite se gagnait à l’extrême. Que l’électorat s’était droitisé et qu’il convenait de le poursuivre dans sa course supposée à l’extrême-droite. Cet échec de Nicolas Sarkozy vient ponctuer une suiteininterrompue d’échecs sur la ligne la plus droitière. Je l’avais écrit dès l’entre-deux-tours de 2012 : c’était un pistolet à un coup. Encore fallait-il en tirer les leçons.

Accessoirement, c’est aussi une leçon pour un autre candidat défait : Jean-Frédéric Poisson. Fallait-il aller tremper nos convictions communes chez Robert Ménard, Présent, Le Salon Beige, ou encore Minute ? Je crains qu’il ne se soit agi de convictions, mais si c’était une stratégie, elle a culminé à 1,5%. 1,5% de l’électorat de droite, et alors que les soutiens précités auront certainement suscité des votes de l’extrême-droite en sa faveur. C’est autant pour la stratégie de catholiques en politique qui, contrairement au choix courageux et gagnant de Sens Commun, pensent devoir aller frayer avec les identitaires et « se compter pour peser ». Cela n’a jamais fonctionné. Cela aussi, je l’écrivais. C’était il y a deux ans. Christine Boutin qui, avec Force Vie, n’avait pas hésité à s’allier au Parti de la France de Carl Lang, avait culminé – alors qu’elle pouvait espérer profiter de la dynamique de la Manif Pour Tous – à 0,74%. Il serait temps que certains catholiques se décident à ouvrir les yeux, a minima pour des raisons stratégiques et dans le meilleur des cas, par un retour à de meilleures convictions.

François Fillon, c’est aussi une victoire – à confirmer – d’une droite qui crée son propre corpus de valeurs, qui ne lorgne ni à sa gauche ni à son extrême-droite.




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