domingo, 9 de febrero de 2014

La guerre façonne et transforme un homme de mille manières. Elle a été d’une certaine façon pour Corti la rencontre avec l’Ange, ce qui lui a permis de garder miraculeusement la vie et de revenir dans son pays


Eugenio Corti : 
un gentilhomme des lettres s'en est allé…

Rédigé par Philippe Maxence


La nouvelle m’est parvenue en prenant son temps, entrant à sa manière en dissidence avec cette modernité qui se perd dans le mouvement qu’elle baptise progrès au détriment de l’être, ce petit reflet divin dans la Création. Eugenio Corti, le romancier italien, – le grand romancier italien –, a rendu son âme à Dieu le 4 février dernier. Que faisions-nous ce jour-là alors que l’écrivain s’apprêtait à retrouver son Créateur, pour cette rencontre qui est la rencontre ? Rien d’important ou d’essentiel, de toute façon, au regard de l’éternel face-à-face qui débutait à ce moment-là.

Face à l'auto-destruction


Eugenio Corti est né le 21 janvier 1921 à Besana in Brianza et il est mort au même endroit, relié de toutes les fibres de son être à cette terre lombarde qui lui a donné une grande partie de lui-même, dans cette alchimie secrète qui s’opère entre l’individu, l’histoire, la géographie et les traditions venues du fond des âges.
Sa vie ressemble pour beaucoup à son personnage du Cheval rouge. Fils d’un petit industriel, Eugenio Corti fit ses études à Milan avant que la guerre interrompe le cours de celles-ci et le projette dans la grande folie d’une humanité décidée à s’auto-détruire. En s’engageant dans l’armée, Eugenio Corti a donné à son existence la direction décisive même si alors il ne pouvait l’imaginer. Devenu lieutenant, il se porte volontaire pour le Front de l’Est, afin de se battre contre le bolchevisme aux côtés des Allemands, alors alliés des Italiens.

Une épopée de la foi


Cette partie de son histoire a donné naissance aux pages très fortes du Cheval rouge, ce vaste roman épique que le théologien thomiste italien, Cornelio Fabbro, a qualifié d’« épopée de la foi », expliquant qu’il s’agit là « de la transfiguration chrétienne des laideurs et des souffrances indicibles qui ont marqué la dernière guerre européenne. » Mais avant même son chef-d’œuvre romanesque, Eugenio Corti avait livré sur ce sujet douloureux son témoignage à travers son Journal de guerre, intitulé La plupart ne reviendront pas, publié dès 1947 en Italie.
La guerre façonne et transforme un homme de mille manières. Elle a été d’une certaine façon pour Corti la rencontre avec l’Ange, ce qui lui a permis de garder miraculeusement la vie et de revenir dans son pays, non seulement pour témoigner, mais pour offrir au monde à travers ce chef-d’œuvre de la littérature qu’est son Cheval rouge cette « transfiguration » dont parle Cornelio Fabbro. Un de ses supérieurs jugeait en 1944 le jeune Corti en ces termes : un« jeune homme au caractère très fort, honnête, généreux, foncièrement indiscipliné, formellement toujours correct ».

L'enfer russe


Étrange portrait pour qui a connu l’écrivain, bien des années plus tard, mais portrait qui explique aussi comment il a pu traverser cette tragédie sanglante de la Seconde Guerre mondiale. En Russie, après 28 jours de retraite, échappant de justesse à l’encerclement de la tenaille soviétique, Corti parvient à retourner en Italie. Au repos, convalescent, il décide très vite de reprendre du service. La chute de Mussolini en 1943 change le cours de l’Histoire de l’Italie et de sa propre histoire. Le jeune officier décide de rejoindre les forces royales réfugiées dans le Sud du pays et il participe aux combats contre les Allemands aux côtés des Alliés. Corti a raconté cette histoire mal-connue en France dans son livreLes derniers soldats du roi, paru dans son pays en 1994.
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